EXPERIENCE D'AIDE : AIDER LES SUICIDAIRES, QUE FAIRE ( page 5 )
Participation à SOS Suicide

COMMENT SURMONTER LE SUICIDE D'UN PARENT !!

Comment vivre après le suicide de son père ?

Un peu de répit et de nouveau le téléphone sonne pour SOS Suicide. Elle s'appelle Nastasia et voudrait parler à Richard. Elle l’a déjà eu deux fois ces derniers jours. Elle est catastrophée par le psoriasis sur la paupière qu’elle a depuis 1 mois. Malheureusement comment répondre, je ne sais pas ce qu’est un psoriasis. Dans un fleuve de larmes elle m’explique le drame qu’est cette maladie. Ca ne me paraissait pas effrayant et j’essayais de la rassurer. Ce n’est que plus tard que j’ai appris comment ces malades, surtout les femmes, peuvent souffrir d’un sentiment de rejet. Visiblement elle est surprise, voir déçue de mon ignorance, nous changeons de sujet.
Il est habituel pour un écoutant de poser des questions sur la famille. Souvent en effet la famille protège du suicide, par l'amour qu'elle peut dégager ou une responsabilité qui donne une raison de vivre. Dans le cas de Nastasia c’est un peu spécial : Elle était très proche de son père, mais il s’est suicidé. Ce n'était pas le psoriasis qui posait problème à Nastasia, mais comment se remettre après le suicide de son père.

Conséquences du suicide d'un parent, impact sur la famille

Nastasia accuse les autres membres de sa famille, sa mère et ses deux frères, d’en être responsables. Suite à des problèmes d’héritage, elle les a attaqués en justice. On dit souvent que l’amour ou la haine donne des raisons de survivre. Pour surmonter le suicide de son père, Nastasia avait choisi la seconde solution. Plus tard, au fil des rencontres que j’ai pu faire, je me suis rendu compte que la haine ne permettait que de mal vivre, surtout celle de ses proches. Elle occupe l’esprit et centre les problèmes sur soi-même. L’ouverture aux autres en est réduite. J’ai été en contact avec une jeune qui en voulait profondément à quelqu’un. Elle a prié toute une nuit pour arriver à lui pardonner. Elle y est parvenue et m’a déclaré en avoir été transformée, libérée. Nastasia préférait s’enfermer dans sa haine plutôt que d'assumer ce deuil, et en ce temps-là je n’étais pas encore assez fort pour la convaincre d’y renoncer. Si le père avait pu imaginer quel désastre familial son suicide allait provoquer, le malheur dans lequel il a ainsi enfermé sa fille qui l'aimait ! L'aurait-il fait si il avait su comment sa fille allait vivre le suicide de son père ?
La haine des proches, je la retrouverais dans beaucoup d'autres cas de personnes suicidaires, combien de gens en souffrance s'y réfugient pensant trouver leur solution !! J'ai fini par apprendre à briser cette haine pour sortir des gens de leur malheur.

Comment soulager : par ignorance !

Changement de direction. Puisque la famille n’est pas un sujet de réconfort, j’aborde les hobbys. Nastasia aime le cinéma. Le dernier film qu’elle a vu est le Grand Bleu. Stupéfaction pour elle : je dois avouer que je ne l’ai pas vu et ne connais même pas son existence. Gros éclat de rire. Nastasia se sent supérieure à cet ignorant que je suis. Jamais je n’aurais cru que le fait d’ignorer le Grand Bleu puise avoir un tel impact : redonner confiance à quelqu’un !

Le matin arrive, j’appelle Franck pour qu’il me débranche, je dois partir au bureau, mais je compte reprendre bientôt.