JUGER LES AUTRES .. ... et la peur du jugement des autres
Ne pas juger les autres ...
Amaury est toujours en conflit avec ses parents. Pour notre deuxième séance, je me rends compte de tout l’intérêt de « la chute d'Adam et Eve » pour résoudre cette situation.
Après l’étude « classique » de ce récit de la Bible, j’entame la conversation sur ce que représente la « connaissance du bien et du mal ». Le péché est-il savoir ce qu’est le bien ou le mal ?
ou plutôt le désir de vouloir le fixer soi-même. Ainsi, on peut juger les autres en fonction de ses propres critères, souvent de son propre intérêt. Et je lui répète
la phrase de l’Evangile « ne jugez pas et vous ne serez pas jugés ». Pour moi, celui qui a eu le premier cette intuition sur l’origine du mal (on ne la retrouve pas
dans le mythe de Pandore) est un véritable génie. Il a tapé dans le mille sur la cause de bien des malheurs.
... pour éviter que la situation ne devienne un enfer ...
Et je lui cite Sartre. Pour lui l’homme doit définir seul le bien et le mal. Quand il dit seul, c’est non seulement sans la croyance d’un Dieu, mais aussi chacun séparément.
Et il arrive à cette conclusion : « l’enfer, c’est les autres ». En fait Sartre ne fait que reprendre la conclusion de la Genèse. Car quelle va être dans la Bible la
conséquence de cette volonté de juger chacun ce qu'est le bien et le mal : le pire des malheurs, le meurtre. Caïn va tuer Abel. Pire que les punitions de Dieu. Et Caïn, après avoir
décidé que le bien pour lui c’était la disparition d’Abel, de quoi a-t-il peur ? des punitions de Dieu ? « Caïn dit à l'Éternel: Mon châtiment est trop grand pour être supporté.
Voici, tu me chasses aujourd'hui de cette terre; je serai caché loin de ta face, je serai errant et vagabond sur la terre, et quiconque me trouvera me tuera. »
Non, son "enfer", ce sont les autres !! Deux à trois mille ans avant Sartre !!
Et je lui fais part d’une de mes constatations : dans un groupe, quand les gens se mettent à se juger les uns les autres, cela devient l’enfer. Pas besoin d’attendre la mort, l’enfer a déjà
lieu sur Terre. L’allusion à sa situation est un peu grosse. L’avantage de cette approche, c’est que la responsabilité de la détérioration en famille n’est pas celle de
quelqu’un en particulier. C’est plus facile de changer si on se sent un peu responsable, mais pas le seul.
... et vaincre la peur ... d'être jugé.
Et nous discutons du mécanisme infernal du jugement : quand on fonde sa relation avec l’autre sur le jugement, on ne peut supporter à ton tour d’être jugé par lui,
on est victime de son propre jugement.
Que la Bible puisse décrire sa situation surprend Amaury. Un déclic commence à se produire. Il va aller vers ses parents et leur parler de notre discussion sur le jugement.
Cette peur du jugement des autres, Amaury m’avouera plus tard qu’elle le rendait violent. Par exemple, s’il voyait quelqu’un rire dans la rue, il avait envie de lui casser la figure
car peut-être se moquait-il de lui. Je lui réponds ;
- « Ah bon, moi si je tombe par terre et si un passant en rigole, je me dis que j’ai rendu quelqu’un heureux, et pour pas cher. »
- « Ah, je n’avais pas pensé à voir les choses comme ça. »